Look at your face, it is so inconspicuous [PV Sean]

Deux jours, c'était la durée de son repos hebdomadaire dont il avait pu profiter avant de retourner bosser et de devoir faire face à ses collègues et à son supérieur hiérarchique. Oh bien sûr, il devait surtout des comptes à River, mais on ne pouvait décemment pas se présenter au boulot avec une tronche en vrac sans avoir besoin de donner quelques explications et, dans son cas présentement, il y avait de fortes chances pour qu'on lui lance de sacrés regards qu'il préférait éviter. C'est pour ça que Callen était venu tôt le matin à la Garda Station, bien plus tôt que ce qu'il faisait d'ordinaire, histoire de pouvoir repartir aussi vite que possible en ayant fait acte de présence. La suture à sa tempe était en partie dissimulée par ses cheveux, de même que les bandages protégeant ses sutures étaient cachés par ses vêtements fraîchement donnés la veille par River, mais malheureusement pour ce qui était de son visage, il n'avait pas pu faire grand-chose. L'une de ses pommettes et un des côtés de sa mâchoire arboraient de magnifiques couleurs variées trahissant la violence des coups qu'il avait reçu, le bleu-violacé commençant à virer au vert jaunâtre, signe que la guérison était en cours bien qu'encore débutante. Un médecin aurait vu d'un seul coup d’œil que cela remontait à au moins deux jours, de même que nombre de ses collègues qui avaient l'habitude de ce genre de marques, aussi plutôt que de chercher à cacher ce qui ne pouvait pas l'être, le Détective avait prit son parti de l'arborer fièrement comme si tout était parfaitement normal... et le pire c'est que cela fonctionna en grande partie.

- Woh McMullen ! Qu'est-ce qui t'es arrivé, tu t'es tabassé avec une armoire à glace ?!

- Y'a deux crétins qui ont essayé de me piquer mon fric à la sortie d'un pub durant le weekend et, comme je n'avais pas ma plaque sur moi, j'ai dû leur expliquer ma façon de penser à ma façon. Je crois qu'ils ne sont pas prêts d'oublier ma tête.

Et moi donc ! T'as pas l'air bien frais. Franchement si Flannigan te vois, tu vas te prendre une soufflante, tu ferais mieux de l'éviter. Allez à plus tard !

Saluant son collègue, Callan força un sourire malgré la douleur à sa mâchoire, traversant ainsi l'endroit en répétant son anecdote chaque fois qu'on l'interpella pour savoir ce qui lui était arrivé, jusqu'à-ce qu'enfin il puisse s'assoir dans son fauteuil avec personne aux alentours. Il grimaça le temps de se caler au mieux, laissant échapper un soupir avant que la porte ne s'ouvre sur un autre de ses collègues dont le sourire, vissé aux lèvres, et l'air amusé qui faisait pétiller son regard en disait long sur le pourquoi de sa présence de ce côté-ci de la station.

- Hey Sean ! Ça a été ton weekend ?

Affectant une bonne humeur relativement présente -après tout, tout n'avait pas été mauvais de son côté non plus- il ne chercha pourtant pas à se lever, préférant éviter de forcer sur ses plaies qui, malgré les anti-douleurs qu'il avait ingurgité une heure plus tôt avec son café, ne parvenaient pas à faire totalement effet.  En prendre plus aurait été contre-productif, Callen sachant pertinemment qu'avec un contrat sur sa tête, il avait intérêt à être sur ses gardes et alerte, d'autant plus qu'à présent qu'il venait de se montrer, la rumeur allait rapidement se répandre comme quoi, malgré ses blessures, il était encore en vie. Et O'Sullivan, de son côté, n'avait pas besoin d'être au courant de tout ce bordel : moins il en saurait, plus il serait protégé. En théorie.

- Dis voir, est-ce que tu sais à quelle heure arrive Flannigan aujourd'hui ? J'aimerais éviter de le croiser si possible.


@Sean O'Sullivan

Quand vous n'étiez pas au meilleur de votre forme, il y avait des gens que vous préfériez éviter, comme votre supérieur hiérarchique, et puis il y en avait d'autres, quand vous les croisiez, il vous suffisait de les voir pour vous sentir un peu plus ragaillardi, peu importait pourquoi ça n'allait pas fort. Sean appartenait à cette deuxième catégorie, le genre de collègue qui peut ne pas plaire à tout le monde, notamment parce que la paperasse et lui ça faisait trois, c'est vous dire, mais sur qui vous pouviez compter en cas de coup dur et qui était du genre aussi teigneux que vous ou peu s'en fallait. Voir son sourire et l'entendre l'appeler "mon grand", surnom attribué dès le premier jour au vu de la haute taille du Détective, suffit à faire réapparaître le sien. Soupirant un peu en appréciant d'être calé dans le fauteuil, il lorgna sur le café et n'eut même pas besoin d'en demander un que son ami le lui servait, lisant certainement dans ses pensées, ou ayant lui aussi connu ce genre de retour de weekend un peu trop agité. Attrapant le gobelet de sa main opposée à l'habituelle à cause de son flanc douloureux, il grimaça un sourire et trempa les lèvres dans l'or noir bouillant, buvant une gorgée douloureuse avant de sourire un peu plus.

« Tiens ! Alors tu sais que pour moi, moins je le vois celui-là, mieux je me porte donc j’en sais trop rien Cal. »

- Pourquoi ça ne m'étonne pas ? Merci pour le café.

Lui répondit-il sur un ton taquin, le sourire au coin des lèvres malgré sa mâchoire douloureuse. Il le regarda prendre place sur l'un des fauteuils situés non loin de là, notant son regard qui se posait sur lui et qui, sous ses dehors de plaisantin, était on ne peut plus sérieux.

« Si tu veux me parler de la gueule que t’as, j’ai le temps hein ? ».

- Moi qui croyait que tu avais des papiers en retard, j'ai dû me tromper.

Il commença à rire et s'interrompit net, grimaçant en se redressant un peu dans le fauteuil, remuant un peu sa mâchoire avant de se rencogner contre le dossier en soupirant fortement. Bordel ce qu'il détestait être dans cet état.

- C'est rien, juste des p'tits cons qui croyaient pouvoir me faire les poches. Ils m'ont eu par surprise mais je peux t'assurer qu'ils sont dans un état bien pire que le mien.

Chose dont se vantait rarement Callen qui se traînait une réputation de Détective intègre et droit dans ses bottes, le genre qui ne cogne que le strict nécessaire, et encore il pourrait encaisser un coup ou deux pour maîtriser quelqu'un sans avoir besoin de l'assommer. De la même façon, lui et Sean avaient déjà eu l'occasion de se défendre contre quelques voyous mal embouchés et en général ceux-ci ne parvenaient jamais à leur faire beaucoup de mal. De par sa taille, notamment, le membre de la Task Force avait tendance à voir son visage épargné par les coups, à moins de tomber sur un grand gabarit, aussi l'excuse des petites frappes voulant lui piquer son portefeuille risquait fort de finir par paraître louche. Buvant une nouvelle gorgée, Callen savoura le goût de son café, jetant un regard en direction de la vitre menant du côté agité de la station, là où il espérait ne pas voir passer Flannigan, avant de reporter son attention sur son collègue et ami.

- Dis voir, puisque tu as du temps, t'échangerais pas quelques permanences avec moi pour cette semaine ? Je risque d'avoir des choses à faire et j'aime pas laisser traîner tu me connais.

C'était dit sur un ton qui se voulait léger, avec un sourire en coin qui ne monta pas jusqu'à ses yeux bleus dans lesquels, au contraire, brillait une lueur féroce et agressive.

Bien qu'il ne soit là que depuis Avril, Callen s'entendait déjà bien avec Sean et ils avaient déjà eu plusieurs fois l'occasion de bosser ensemble, assez pour partager des altercations avec différentes sortes de prévenus plus ou moins dangereux selon les bestiaux. Aussi quand le Détective osa sortir son excuse toute prête à son collègue ne put-il s'empêcher d'esquisser un sourire en coin en l'entendant lui demander s'il se foutait de sa gueule. Évidemment qu'il n'était pas dupe, il n'avait pas obtenu son poste en se tournant les pouces et c'était de loin l'un des meilleurs gardiens qui soit, en tout cas selon le blond, quand bien même il désapprouvait régulièrement ses écarts qu'il comprenait malgré tout. Il le suivit du regard alors qu'il allait s'allumer une clope, levant les yeux au plafond avant de boire une gorgée de café, faisant comme s'il n'avait rien vu.

« Je t’ai déjà vu te fritté et je peux te dire que la personne en face de toi à dû subir mais pour que toi tu sois dans cet état, ce n’était pas des petits cons ! Après tu ne veux pas en parler, je comprends. ».

- Disons que c'est compliqué.

Répondit d'abord simplement Callen avant que son pote, presque un ami même en vérité, n'enchaîne sur sa demande concernant leur planning de présence.

« Et pour les jours, c’est sans soucis, même si tu me devras me payer quelques bières plus tard. ».

- Ça vaudra au moins ça et un bon resto en plus. Mais bon... je crois que tu mérites surtout des explications Sean.

Lentement et avec précautions, le Détective se leva du fauteuil, marchant d'un pas raide jusqu'aux stores de la zone vitrée qu'il ferma les uns après les autres, se moquant bien qu'on se demande pourquoi deux gardiens avaient besoin d'un peu d'intimité. Une fois fait, il fit demi-tour et s'arrêta à mi-chemin, portant la main à sa chemise qu'il souleva avec précaution, révélant les bandages autour de son abdomen et de ses flancs. Dépassant de l'abri des bandes blanches, des marques de coups aux teintes similaires à celles sur le côté de son visage. Il tira avec une infinité de précautions sur les bandages, révélant une blessure par balle recousue sur le flanc droit et ce qui ressemblait à un coup de couteau au ventre. Callen grimaça un sourire et remis les bandages en place, abaissa le pan de sa chemise et alla se rassoir lentement dans le fauteuil en soupirant plus fortement, ne cherchant plus à dissimuler les douleurs qu'il éprouvait. Il avait l'impression d'être un petit vieux de quatre-vingt dix ans incapable de tenir sur ses jambes, une plaie.

- Pas un mot à Flannigan surtout. La Mafia m'a dans le collimateur, je l'ai échappé belle pour cette fois, mais c'est pas dit qu'ils reviennent pas à la charge ces pourris.

Imitant Sean, il tira son paquet de cigarettes de l'intérieur de son manteau, en sortit une et l'alluma, faisant signe à son collègue d'ouvrir un peu plus la fenêtre. Il souffla la fumée avec force, se détendant un peu, vidant son gobelet de café qu'il posa sur le bureau à portée de bras.

- Va falloir que tu restes à distance quelques temps d'ailleurs, j'aimerais pas que tu te prenne une balle juste parce que t'étais au mauvais endroit, au mauvais moment. C'est pour ça que j'ai besoin qu'on échange nos jours, histoire que je puisse m'absenter sans que Flannigan ne se mette à fouiller dans tout ce bordel.

Callen tira encore sur sa cigarette, regardant les minces volutes de fumée s'en échapper avant de darder un regard bleu intense sur son collègue, le genre que Sean n'avait jamais vu chez lui auparavant, mais que potentiellement il avait déjà pu apercevoir dans son propre reflet parfois : le regard de celui qui va enfreindre la loi, qui le sait, mais dont la détermination ne flanchera pas.

- J'attends que River soit là pour lui expliquer et après je rentrerais chez moi. J'aime pas l'idée de devoir me planquer, mais je vais devoir attendre que ça se tasse un peu.

Le Détective eut un sourire amer au coin des lèvres, du côté droit où cela n'était pas trop douloureux car encore épargné.


@Sean O'Sullivan

Callen aurait du se douter que Sean comprendrait, pas parce qu'il le savait capable d'enfreindre parfois la loi lorsque cela l'arrangeait, mais surtout parce qu'ils avaient bien plus en commun que ce que leurs méthodes de travail laissaient à penser. Il lui avait montré ses blessures, baissant sa garde pour de bon, et c'était la première personne en-dehors de River qui avait droit à un tel degré de confiance de sa part au sein de la Garda Station, ce qui n'était pas rien. Le Task Force entreprit ensuite de s'allumer une clope amplement méritée, tirant dessus avec un soulagement qu'il ne cherchait plus à dissimuler, pas plus que les grimaces de douleur qui lui échappaient à des moments.

« Putain t’es pas dans la merde toi ! Et tu sais bien que je peux être une tombe quand je le veux non ? »

- Oui je sais, je sais, c'est juste... que je suis un peu plus sur mes gardes tu t'en doutes.

Vu comme on lui était tombé dessus, la dernière chose dont il avait besoin c'était de prendre un risque inconsidéré, même si son collègue s'était très vite montré amical et similaire à lui dans sa fâcheuse tendance à agir en solitaire au détriment de la hiérarchie.

« C’est mignon… Je ne suis pas assez con pour m’embrouiller avec la mafia Cal’, mais comme tu es mon pote, si jamais je peux faire quelque chose, je suis là ! »

Le blond l'avait regardé approché et, l'entendant parler avec sérieux, il lui adressa un signe de tête, son expression trahissant qu'il était sincèrement touché par cette proposition qu'il savait totalement désintéressée.

- Je te remercie Sean, t'es vraiment un ami, et l'inverse est vrai aussi : si je peux t'aider un jour pour quelque chose, n'hésite pas. En attendant va falloir se la jouer discret.

« Ouais faut tasser tout ça, en espérant qu’il ne t’arrive rien ! Même moi je fais gaffe avec la mafia Cal… Y a un truc entre toi et Riv je me trompe pas ? »

Ah, la grande question, voilà que son collègue mettait le doigt dans l'engrenage et sans gants de protection. Un léger sourire étira le coin des lèvres de Callen qui acquiesça : inutile de nier.

- Disons qu'on est des amis qui se comprennent et qui passent parfois du bon temps ensemble quand l'envie nous en prend. Y'a pas d'amour entre nous, pas comme toi et Maureen...

Le tacla-t-il gentiment, lui adressant un regard entendu avant de continuer.

- ... mais c'est le genre d'amie qui irait en Enfer pour moi et moi pour elle. Elle s'en est pris à un type de la Mafia et l'info a fuité, du coup on a des cibles peintes dans le dos et on va devoir être prudents pendant quelques temps.

Le Task Force tira sur sa cigarette, finissant de la cramer presque jusqu'au filtre avant de grimacer : la fin était toujours dégueulasse. Il se leva lentement, difficilement, allant écraser son mégot sur le rebord de la fenêtre, jetant un bref coup d’œil dehors avant de l'y jeter, tant pis pour l'écologie. Le blond se retourna vers Sean, l'observant avec gravité.

- Un de ces jours, faudra que je te raconte deux-trois trucs à mon sujet, et tu me diras ce que tu fais vraiment quand ton coéquipier, moi et les autres ont a le dos tourné. Et fais pas cette tête, moi aussi j'ai déjà tabassé des gars sans en avoir le droit.

Son sourire en coin revint à la charge et Callen se traîna jusqu'au fauteuil, s'y réinstallant en grognant de douleur, soupirant fortement une fois bien placé.

- Bordel j'ai l'impression d'être un vieux sur le point de clamser. J'espère jamais finir dans cet état à 90 ans.

Il adressa un regard amusé à Sean, retenant un rire à cause de la toux que cela risquait de lui provoquer, tout en sachant pertinemment que son ami risquait fort de le relancer d'une façon ou d'une autre.


@Sean O'Sullivan